Moins relecture que résurrection, DEADJAZZ est le nouveau projet collectif des frères BELMONDO consacré à la musique du GRATEFUL DEAD. De scintillements cosmiques engrooves funky, de balades aux airs d’hymne en déflagrations sonores, DEADJAZZ s’offre comme une série de stations sur le chemin illuminé du groupe culte de San Francisco…Avec Lionel et Stéphane Belmondo, Eric Legnini, Laurent Fickel- son, Thomas Bramerie et Dré Pallemaerts : un casting de fous pour une musique de feu !
C’était l’époque où Miles Davis lorgnait du côté de Jimi Hendrix et de Sly Stone, sous l’influence d’une certaine Betty Mabry. L’époque où les ultimes échos cosmiques lancés par John Coltrane se dissipaient dans les volutes des ragas auxquelles l’avait initié Alice qui ne tarderait pas à partager ses Illuminations avec Carlos Santana. L’époque où Wayne Shorter s’évadait vers les jungles pluvieuses du « Moto Grosso Feio ». Où Herbie Hancock, converti au bouddhisme, surfait sous le nom de Mwandishi très haut dans des nuées de synthés. Où Freddie Hubbard pétrissait Red Clay avec un hédonisme funky et langoureux. Cet âge où le jazz s’électrisait, s’ouvrait aux sonorités du monde, à l’énergie du rock, se dilatait au fil de grooves obsédants ou de longues échappées planantes, se chargeait de spiritualité et d’œcuménisme fraternel à mesure que le monde semblait glisser vers l’abîme, est aussi le grand âge du Grateful Dead.
Le groupe mythique de San Francisco est l’un des plus emblématiques du rock. Il fut aussi l’un des plus durables et des plus fantasmés, agrégeant une nébuleuse de fans avides de s’abandonner aux longues jams collectives dé- veloppées sur scène. Alimenté par le groupe qui tolérait bandes et magnétos au pied de ses micros, le Grateful Dead a montré que le rock pouvait être une aventure collective, échappant aux formats cadenassés des chansons pour larguer les amarres de l’improvisation, d’autant mieux que les capaci- tés sensorielles de l’équipage étaient dilatées sous l’effet des acides. Tout cela ne serait qu’anecdotique si, derrière le mur d’amplis, les bootlegs auto- risés et le culte hippie, on n’avait affaire à un groupe qui avait embrassé bien plus large que la seule mythologie du rock’n’roll pour inventer la bande-son d’une époque, de ses élans, de ses paradoxes, de ses aspirations et, admet- tons-le aussi, de ses errances. Comme le disait le fameux Bill Graham, grand manitou du Fillmore West, temple du psychédélisme ambiant où le Dead avait ses quartiers, “they are not the best to do what they do, they are the only ones that do what they do” [ce n’est pas qu’ils soient les meil- leurs dans ce qu’ils font, c’est qu’ils sont les seuls !] — une phrase que, soit dit en passant, on appliquerait bien aux Belmondo, qui ne partagent pas seulement avec le Dead, d’avoir signé un disque intitulé Hymne au Soleil (Anthem of the Sun, deuxième album du groupe américain, sorti en 1968) !
Drôle d’équipage que Grateful Dead, porté par un guitariste aux allures de gourou, Jerry Garcia, à l’origine ancré dans le bluegrass et la folk, touche-à-tout du banjo à la pedal-steel et l’harmonica, avant de s’imposer, converti au rock par les Beatles, comme le guitariste que l’on sait, admi- rateur de la virtuosité de Django Reinhardt (il lui manquait à lui aussi un doigt) et du blues rock de Roy Buchanan, dont il offrait une synthèse toute personnelle. Secondé par le fidèle Bob Weir, qui s’était donné pour mission de l’accompagner avec la même acuité que McCoy Tyner dans le quartet de John Coltrane, Garcia pouvait bifurquer vers les horizons les plus débridés, grâce à un bassiste, Phil Lesh, passé par le violon et la trom- pette, féru de musique contemporaine (il avait étudié auprès de Luciano Berio au Mills College), et à deux batteurs dont l’un, Bill Kreutzmann, était féru de jazz et l’autre plus tourné vers les rythmes du monde, Mickey Hart. Aux claviers, Ronald McKernan dit « Pigpen », membre du fu- neste « club des 27 » comme son amie Janis Joplin, pétri de R&B, était enclin à agréger au répertoire du groupe des titres d’Otis Redding ou de Wilson Pickett, et son successeur, Keith Godchaux, intégra le son du Fender Rhodes au melting pot de la formation.
Pensé selon un dispositif à deux claviers en miroir — qui sont comme le pendant es deux guitares au cœur de la machine du groupe d’origine — Deadjazz vrombit au son des pianos et orgues vintage, dont les timbres diffractés et les sonorités saturées renouent avec l’esprit des sixties. Joués avec autant de fulgurance que d’assurance, le Fender Rhodes sous effets d’Eric Legnini et l’orgue Farfisa soigneusement dérouté par Laurent Fickelson se mêlent et se reflètent dans un foisonnement qui donne toute sa couleur au projet. Dans la position de vocalistes, les vents des Belmon- do énoncent les mélodies des chansons qui comptent, pour la plupart, parmi les plus marquantes du groupe, écrites pendant la première décen- nie de son existence (entre 1965 et 1975) et font rugir leurs instruments avec la fougue inexpugnable qu’on leur connait. À la contrebasse, Thomas Bramerie pose les bases de chaque morceau en faisant oublier qu’il joue sur un instrument acoustique tant son attaque et la rondeur de sa sonori- té ont de présence, tandis que Dré Pallemaerts fait tourner le moindre groove avec l’assurance et la précision qu’on lui connait.
Dégageant les formes des morceaux, conservant la complexité sous l’ap- parente simplicité, les mètres impairs comme les cheminements harmo- niques, Lionel Belmondo a pensé le répertoire comme des chansons qui s’ouvrent sur l’improvisation et accueillent les solos qui déchirent ou illuminent leur cadre. Du groove funky de China Cat Sunflower, avec un Sté- phane Belmondo branché sur wah-wah comme on ne l’entend pas sou- vent, à la délicate Rosemary qui prend des allures d’hymne liturgique aérien, des scintillements cosmiques saturés d’électricité de Dark Star vrillé par le soprano luminescent de Lionel Belmondo au long free trip halluciné de Blues For Allah, de la forme cyclique toute médiévale de St. Stephen enchai- né à The Eleven comme le faisait le groupe en concert, Deadjazz s’offre comme une série de stations épiques sur le chemin illuminé du Grateful Dead, moins hommage qu’interprétation, moins relecture que résurrection.
// LINE-UP //
Lionel Belmondo, saxophone ténor, soprano, flûtes // Stéphane Belmondo, trompette, bugle // Laurent Fickelson, orgue Farfisa // Eric Legnini, piano Fender Rhodes, Nova Bass Station // Thomas Bramerie, contrebasse // Dré Pallemaerts, batterie
No upcoming shows scheduled
Concerts passés
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07 Oct 2023 | LES FRERES BELMONDO | Tourcoing New Morning | New Morning |